Le 30 août 1548, les Confrères de la Passion acquièrent l’Hôtel des ducs de Bourgogne, alors mis en vente par le roi, pour le convertir en salle de spectacle. Ils comptent y représenter les pièces religieuses, mystères et moralités, qui constituaient leur répertoire habituel. Mais le Parlement décide cette même année de prononcer un arrêt afin de limiter le théâtre sacré [1]Sur ces dispositions et leurs limites, Voir Jelle Koomans, « L’effectivité de la législation sur le théâtre »Jelle Koopmans, „L’effectivité de la législation sur le théâtre“, … Continue reading. Les Confrères ne renonceront pas au théâtre: ils obtiennent même un monopole sur les représentations des pièces profanes et donnent des farces. La salle prend la forme d’un « théâtre à la française », c’est-à-dire d’un long rectangle (31 m x 13 m), bordé de loges latérales. Au centre se trouve la fosse, où se tiennent, debout, les spectateurs du parterre. L’hôtel de Bourgogne est alors le seul théâtre public permanent de la capitale. Les autres troupes doivent se contenter des tréteaux mobiles montés dans les foires.
Pour faire face aux dégradations progressives du bâtiment, les Confrères furent contraints de louer leur salle à des troupes itinérantes à partir de 1578. Dès 1599, l’Hôtel de Bourgogne accueille, encore irrégulièrement, les « Comédiens ordinaires du roi », ainsi nommée parce qu’ils s’étaient produits devant le souverain. On compte parmi eux les plus célèbres farceurs du temps, Gros-Guillaume, Gautier-Garguille, et Turlupin ; mais aussi Bellerose, proche du dramaturge Alexandre Hardy, et qui jouera aussi, plus tard Horace, Cinna, ou Polyeucte.
Différents conflits avec d’autres troupes, en particulier celle du prince d’Orange, qui partage l’Hôtel de Bourgogne avec les Comédiens du roi de 1622 à 1629, aboutissent à une décision royale le 29 décembre 1629: les Comédiens du roi se voient à cette date reconnaître un bail exclusif pour trois ans.
La salle de l’Hôtel de Bourgogne se trouve concurrencée à partir de 1634 par celle du Marais, puis à partir de 1662 par celle du Palais-Royal, où se produit Molière. Mais la « comédiens du roi », bientôt connus aussi sous le nom de « grands comédiens », prennent des mesures pour résister aux troupes rivales: en 1647, ils rénovent la salle et accueillent Floridor, qui quitte le Marais pour succéder à Bellerose et attire Pierre Corneille.
L’Hôtel de Bourgogne continue de jouir d’un grand prestige pendant tout le siècle: toutes les tragédies profanes de Racine, à l’exception de La Thébaïde, y furent créées ou représentées l’année de leur création. La rivalité des deux Bérénice, en novembre 1670, illustre cette vive concurrence entre les théâtres: celle de Racine fut jouée à l’Hôtel de Bourgogne, et celle de Corneille au Palais-Royal. Les deux pièces rencontrèrent d’abord le succès.
References
↑1 | Sur ces dispositions et leurs limites, Voir Jelle Koomans, « L’effectivité de la législation sur le théâtre »Jelle Koopmans, „L’effectivité de la législation sur le théâtre“, Cahiers de recherches médiévales et humanistes, 23 | 2012, p. 141-150, https://journals.openedition.org/crm/12821. |
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